22 Juin 2018
Discours d’Amélia Lakrafi lors du Forum des Diasporas organisé au Palais des Congrès de Paris
Chers amis,
Tout d’abord, merci de m’accueillir j’en suis absolument honorée.
Merci aux interventions, qui témoignent de trajectoires inspirantes.
Chaque idée, chaque parcours évoqué, illustre, l’importance de ce forum qui devrait permettre de tisser des liens afin de mieux nous connaître et d’envisager des initiatives notamment collectives, et ce, quel que soit nos domaines de compétence.
Vous l’avez souvent entendu, notre diaspora est plurielle, nous venons tous d’horizons différents mais nous partageons ensemble le souhait de réussir dans ce beau pays qu’est la France, où nous vivons depuis plusieurs générations parfois.
Pour ma part, et -nous sommes nombreux à le penser-, je suis convaincue que notre diaspora est une véritable richesse pour la France, pays historiquement construit à partir de vagues successives d’immigration.
Cette richesse elle vaut également pour le continent africain avec lequel nous avons tous gardés, ou allons le faire, des liens forts faisant de chacun de nous un véritable pont entre les continents.
Nous partageons avec de nombreux pays africains un bien précieux : une langue commune, le français.
Dans un monde menacé d’uniformisation culturelle et linguistique, renforcer la communauté de ceux qui ont la langue française en partage est en effet une priorité du président de la République et du gouvernement. Car défendre la langue française, ce n’est pas défendre les intérêts de la France, c’est défendre et incarner à travers la variété des langues, des valeurs communes.
Des valeurs que nous nous devons de transmettre à notre jeunesse, jeunesse qui constitue l’avenir des relations entre la France et l’Afrique et qui concentre la majeure partie de nos préoccupations. A cet égard, je ne peux que me réjouir qu’une des quatre thématiques de ce forum soit « jeunesse et emploi ».
L’emploi est en effet un des autres sujets majeurs qui préoccupe le plus ici comme dans les pays africains. Qu’il s’agisse du numérique ou du développement durable, ces secteurs du futur vont constituer un axe de travail prioritaire.
L’Afrique était ainsi l’invité d’honneur du salon « Viva Tech » et je ne peux que me réjouir du foisonnement d’idées et de start-up en France et sur le continent africain.
L’entreprenariat et la prise d’initiatives doivent être particulièrement encouragés. Ces nouvelles perspectives d’emplois doivent être également accessibles aux hommes et aux femmes et seront, je le pense, une manière de parvenir à une plus grande émancipation de celles-ci.
Les diasporas doivent être porteuses d’un message d’espoir et d’engagement pour l’avènement de l’égalité Femme-Homme.
Chers amis je voudrais m’adresser à vous de manière franche et soyez sûr que je suis convaincue qu’il faut l’être.
Depuis de trop nombreuses années, nos gouvernements successifs ont utilisé à tort l’expression de « politique africaine de la France ».
Or, comme l’a évoqué le Président de la République Emmanuel Macron à l’occasion de ses allocutions à Ouagadougou et Abidjan, nos relations doivent et sont en train de prendre une nouvelle dimension.
Il doit être question de relations multilatérales entre l’Afrique la France mais aussi, plus largement l’Europe.
Nos deux continents partagent un destin commun mais aussi des préoccupations communes telles que les défis climatiques, migratoires et sécuritaires. ce n’est qu’ensemble, que nous pourrons les surmonter.
C’est pourquoi, comme l’a annoncé le Président de la République, un nouveau traité verra le jour en 2020 et permettra de renforcer les relations entre la France et l’Afrique dans les domaines culturels, scientifiques, économiques, académiques…
Afin d’œuvrer au succès de celui-ci, toutes les bonnes volontés seront les bienvenues, qu’elles se trouvent dans les milieux d’affaires, de la culture ou encore de la politique.
Je voudrais, à cet égard, effectuer une légère digression en évoquant mon parcours personnel, parcours ayant des points communs avec beaucoup d’entre vous :
Je suis française d’origine marocaine, née à Casablanca en 1978, arrivée à l’âge de 2 ans en France avec mes parents.
Passée par l’école publique française, j’ai travaillé durant mes études, comme beaucoup d’entre vous aussi. Plusieurs petits boulots car je voulais continuer mes études malgré les moyens contraints.
Je me suis offert le luxe de rêver de devenir patron, et je m’en suis donné les moyens, pris des risques, créé des sociétés, essuyer des difficultés, mais je n’ai jamais baisser les bras…
J’ai la chance de faire partie d’une majorité qui va voter une loi pour le « droit à l’erreur » c’est une première, un changement radical dans nos sociétés habitués à la méfiance, nous passons à la bienveillance !
J’ai eu grâce à mes activités professionnels l’occasion de me déplacer en Afrique et d’y nouer des liens fort. Je déplorais malheureusement le comportement de certains français sur ce continent.
C’est pourquoi lorsqu’Emmanuel Macron a émergé dans la vie politique française j’ai tout de suite été séduite par son discours novateur et par sa vision ambitieuse pour nos deux continents.
Vous comprendrez aisément à quel point j’ai été fière de devenir députée de la nation, de porter les aspirations de chacune et chacun d’entre vous et de contribuer à transformer la société pour la rendre plus juste, plus progressiste et surtout plus inclusive.
Si j’ai parlé de mon parcours ce n’est pas pour moi mais bien pour affirmer qu’il est possible, en France, de réussir en tant que membre de la diaspora africaine, mais aussi membre d’une certaine minorité visible que peuvent être « les femmes » Devenue une fière sérial entrepreneuses, commandant de réserve cyber-défense et maintenant député-e-s française.
Naturellement, il y a des obstacles, des difficultés, des freins et par moment du découragement, des interrogations, voire de la frustration, mais n’oubliez jamais « impossible n’est pas français », ayez confiance en vous, prenez des risques, on a le droit de se tromper, ce que je retiens, : l’efficacité d’avoir un mentor, donc une des idées de mon humble expérience c’est que le mentorat est un outil simple et d’une efficacité redoutable pour nos entrepreneurs en herbe.
Chers amis, si j’ai tenu à m’exprimer devant vous aujourd’hui, c’est bien parce que je suis convaincue que la France, l’Afrique et, plus largement, l’Europe, partagent une destinée commune qui, pour se concrétiser, passera nécessairement par un engagement sans failles de nos diasporas.
A cet égard, je rejoins la position de notre Président de la République qui a affirmé, dans son discours à Ouagadougou, que nous devions considérer l’Afrique comme, je le cite, « un continent pluriel, multiple, fort, et comme un continent où se joue une partie de notre avenir commun ».
Et comme le dit si bien le Président Paul Kagamé « Emmanuel Macron introduit une dose de fraîcheur dans les relations franco-africaine ».
Dans ce contexte, vous pouvez compter sur moi et sur la majorité présidentielle pour nous engager pleinement au service de ce rapprochement entre la France et l’Afrique et au service de la valorisation des diasporas.
Vous me permettrez de souligner la richesse et la diversité de la diaspora française sur le continent africain dont je représente une grande partie dans ma circonscription. Dans les 49 pays qui la composent, près de 300 000 français vivent, étudient, travaillent et investissent, ils sont autant de ponts entre la France et les différents pays d’Afrique. Ces deux diasporas sont aussi essentielles l’une que l’autre.
Alors oui, de nombreux chemins restent à explorer pour renforcer nos relations mais je suis certaine que la réussite de ce forum, et j’en profite pour féliciter ses organisateurs, contribuera grandement à mettre en lumière les opportunités multiples.
Dans le monde incertain où nous vivons aujourd’hui, dans cet environnement instable, où l’on observe partout le repli, des politiques nationalistes et de peur, nous représentons l’espoir.
Car tous autant que nous sommes, dans la diversité de nos origines et de nos parcours, nous ou nos parents, avons pris l’audacieuse décision de venir en France pour y mener des études, suivre une carrière, tenter notre chance ou fuire une situation insoutenable.
Et aujourd’hui, vous pouvez être fiers de cette audace, celle de ceux qui ont osé .
Cette audace, ces efforts, il est venu le temps de les utiliser pour modifier la relation entre nos différents pays d’attache et notre pays d’adoption.
C’est à nous de la décider, de la dessiner, il suffit que nous en ayons conscience et que nous nous posions ensemble la question : quel lien voulons nous créer entre les 2 continents qui ont forgés notre personnalité ?
Je vous remercie.