Question 2428 publiée le 14/11/2017
Mme Amal-Amélia Lakrafi interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, à propos de la difficulté rencontrée par un couple dont l’un des conjoints est français. Après le mariage effectué à Madagascar, pays du conjoint étranger et après la procédure dite de certificat de capacité à mariage (CCPAM), le conjoint étranger se trouve dans l’obligation de rester dans son pays, ou pour raisons économiques ou familiales, alors que son conjoint doit revenir en France. Ce couple peut se trouver séparé pendant un certain temps. Or il se trouve qu’au changement de situation permettant enfin la réunion du couple, ce dernier se trouve face à l’impossibilité d’obtenir un visa auprès de l’administration consulaire française qui oppose que « la preuve d’une vie commune n’est pas faite ». Dans ce cas précis, la séparation n’étant pas le fait d’un choix mais d’une obligation, il apparaît que ce refus ne garantit pas au couple marié, alors qu’il a rempli toutes les conditions (mariage célébré dans les formes admises dans le pays, ayant été précédé de la publication des bans et ayant fait l’objet d’une transcription sur les registres d’état civil français), le droit au mariage, tel que défini dans la Convention européenne des droits de l’homme. De plus ce refus porte atteinte au principe constitutionnel du droit au mariage puisqu’il est remis en cause par des éléments qui ne devraient pas intervenir dans une situation où les conjoints n’ont d’autre choix que de se séparer pendant quelque temps, ce qui ne remet nullement en cause leur union. Dans ce cadre-là, remettre en cause le mariage au prétexte que « la preuve d’une vie commune n’est pas faite » constitue une atteinte à une liberté fondamentale. Dès lors, elle aimerait savoir quels mécanismes seront mis en place pour pallier une telle restriction dans l’applicabilité et l’effectivité des libertés fondamentales et particulièrement dans celle concernant le droit au mariage.
Réponse
En vertu de l’article L. 211-2-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA), « le visa de long séjour ne peut être refusé à un conjoint de Français qu’en cas de fraude, d’annulation du mariage ou de menace à l’ordre public ». Les autorités diplomatiques et consulaires sont tenues de statuer sur les demandes de visa de long séjour formées par les conjoints de Français dans les meilleurs délais. De même, en vertu de l’article L. 313-11 du CESEDA, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit à l’étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n’ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l’étranger, qu’il ait été transcrit préalablement sur les registres de l’état civil français. Enfin en vertu de l’article 215 du code civil « Les époux s’obligent mutuellement à une communauté de vie. La résidence de la famille est au lieu qu’ils choisissent d’un commun accord ». Lors de l’examen de la demande de visa en qualité de conjoint de Français, les services des visas vérifient donc le respect de ces différentes conditions à la date de la demande de visa. Pour cette raison, la réalité du lien matrimonial doit être établie par la production d’une copie récente de l’acte de mariage français, transcrit ou dressé, afin de s’assurer que le mariage n’a pas été dissous. En outre, le service des visas doit vérifier l’intention matrimoniale des époux et l’absence de fraude en cas d’élément nouveaux portés à leur connaissance depuis la transcription du mariage. Ainsi, si des choix personnels amènent les époux à ne pas respecter l’obligation de communauté de vie prévue par l’article 215 du code civil pendant plusieurs années, les services des visas peuvent être amenés à effectuer des enquêtes approfondies en liaison notamment avec les autorités préfectorales territorialement compétentes afin de vérifier l’absence de fraude. Enfin, saisi au contentieux, le juge administratif contrôlera strictement l’existence de cette fraude en raison de l’absence d’intention matrimoniale et l’absence d’atteinte à l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’Homme.
Pour plus de détail: http://www2.assemblee-nationale.fr/deputes/fiche/OMC_PA721004