Question n°40557 publiée le 03/08/2021
Mme Amélia Lakrafi attire l’attention de M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur la situation économique des entrepreneurs français de l’étranger (EFE) qui résident dans des pays dans lesquels les aides sociales et économiques sont inexistantes pour faire face à la crise sanitaire. Les chefs d’entreprises français de TPE ou de petites PME résidant à l’étranger percevaient pour la plupart avant même la crise sanitaire des revenus modestes. La crise sanitaire a profondément affecté l’activité de ces EFE, notamment pour ceux travaillant dans le secteur du tourisme et de l’hôtellerie-restauration, et a ainsi constitué pour eux une véritable catastrophe économique. Selon un rapport du CNCCEF datant de la mi-2020, 70 % des EFE prévoyaient un chiffre d’affaires en baisse sur l’année et 30 % avaient déjà déposé le bilan. 87 % de ces entreprises n’avaient reçu aucune aide du pays dans lequel elles sont implantées et celles accordées par les consulats français et les OLES locales, qui sont des aides sociales, sont insuffisantes pour leur permettre de relancer leur activité économique. La garantie « Choose Africa Resilience » votée lors du PLFR3 de juillet 2020 et mise en place par Proparco avait pour objectif de soutenir le secteur privé en Afrique, dont les EFE, en leur permettant d’accéder à des liquidités et de maintenir leur activité économique. Cette facilité est toutefois à ce jour seulement disponible dans une demi-douzaine de pays d’Afrique. Les conditions pour l’obtenir auprès des établissements bancaires partenaires de Proparco sont par ailleurs très restrictives et il semblerait que très peu d’EFE aient, dans les faits, pu en bénéficier. Le seul nouvel outil mis à la disposition des EFE depuis l’apparition de la crise sanitaire est la possibilité sous certaines conditions de bénéficier de VIE grâce à un dispositif mis en place par le CNCCEF et CCIFI, mais il ne s’agit pas à proprement parler d’un outil destiné à pallier les effets de la crise économique. Et il n’est par ailleurs pas forcément adapté pour les TPE. Mme la députée souhaiterait ainsi savoir quelle aide, non seulement sociale mais aussi économique, pourrait être apportée à ces EFE résidant dans des pays dans lesquels les aides sont inexistantes et qui contribuent pourtant souvent au commerce extérieur de la France et à la présence économique du pays de par le monde. Par ailleurs, elle souhaiterait savoir si Proparco pourrait mettre en place une évaluation permettant de déterminer si les critères d’attribution de la facilité « Choose Africa Resilience » par ses établissements bancaires partenaires permettent bien d’atteindre le public ciblé qui est celui des TPE et petites PME en Afrique dont celles qui appartiennent à des entrepreneurs français
Réponse : Les entrepreneurs français de l’étranger (EFE) détiennent ou dirigent des entreprises de droit local, sans relation capitalistique ou structurelle directe avec un établissement enregistré en France. Ces entreprises ne peuvent bénéficier des mesures de soutien en trésorerie prévues pour les entreprises françaises en réponse à la crise sanitaire (prêts garantis par l’État, fonds de solidarité notamment), qui ne sont pas destinées aux entreprises immatriculées à l’étranger et n’ont pas été notifiées comme telles à la Commission européenne. À la suite d’une enquête lancée par la délégation sénatoriale aux entreprises auprès des services économiques des ambassades de France en Allemagne, Italie, Suède, Royaume-Uni et Pays-Bas, afin de produire une analyse comparée des mesures réservées aux entreprises de ces différents voisins européens implantées à l’étranger, il s’avère d’ailleurs qu’aucun autre pays n’a mis en place de dispositif d’aides spécifiques pour ses entrepreneurs à l’étranger. Toutefois, au-delà des programmes d’aides mis en place dans leur pays de résidence, quand c’est le cas, les EFE peuvent bénéficier d’autres dispositifs de soutien répondant de manière ad hoc aux besoins qu’ils ont exprimés lors d’enquêtes menées auprès d’eux par le réseau des conseillers du commerce extérieur de la France et de CCI-FI : – une expérimentation de portage de VIE par une structure française créée par CCI France International et le CNCCEF, EFE International, a été lancée au printemps 2021, en lien avec Business France et en accord avec les ministères de tutelles de l’agence. Ces VIE pourront ensuite être en mission auprès d’entreprises locales de droit étranger dirigées par des EFE qui seraient rentrés au capital d’EFE International du fait de leur lien économique fort avec la France. Ces VIE constitueraient un véritable soutien en termes de ressources humaines aux équipes locales. Plusieurs comités de sélection d’EFE (incluant des représentants des CCEF, de CCI-FI et en présence de Business France et des services économiques des ambassades) se sont mis en place dans les 65 pays pré-définis pour l’expérimentation, afin de commencer à recenser les entreprises intéressées. Au 31 août 2021, 6 postes de VIE avaient ainsi été créés, le plein déploiement de l’initiative restant freiné par la situation de fermeture dans plusieurs pays émergents dans lesquels existent des marques d’intérêt. En fonction de l’évolution de la situation sanitaire, notamment en Asie, EFE International envisage une relance de la communication autour du site web spécialement dédié aux EFE et du projet de portage de VIE en cours. – les EFE détenant des entreprises qui importent leurs produits depuis des entreprises françaises bénéficient indirectement de tous les soutiens à l’exportation, en particulier dans le cadre des plans d’urgence et du plan France Relance (et notamment son volet export), ce qui leur permet de maintenir leur présence à l’international. Par ailleurs, il existe un dispositif d’aide sociale mis en place depuis l’année dernière, visant à venir en aide aux Français de l’étranger en difficulté matérielle du fait de la crise sanitaire. 25 millions d’euros, issus de l’enveloppe budgétaire ouverte à cet effet en loi de finances rectificative n° 3 pour 2020, ont été reportés en 2021, pour continuer à soutenir les Français de l’étranger les plus vulnérables, y compris les EFE. S’agissant des outils du groupe Agence française de développement (AFD), déployés par Proparco, sa filiale dédiée au secteur privé, ils permettent de soutenir directement des entreprises françaises à l’étranger dans certains secteurs clés : – la garantie ARIZ permet de couvrir partiellement des prêts accordés aux PME par des institutions financières dans les pays d’intervention du groupe. Cet outil permet donc d’accompagner les entreprises détenues par des EFE, avec l’aide des services économiques qui participent à leur bonne information et identification ; – l’initiative « Choose Africa » a été renforcée en 2020 par le déploiement de « Choose Africa Resilience », qui mobilise notamment une garantie État de 160M€, ainsi que des fonds de l’Union européenne, pour déployer près d’1 milliard d’euros en faveur des TPE et PME africaines, dont celles détenues par les entrepreneurs français à l’étranger. Les services économiques sont étroitement associés au déploiement de cette initiative, ils en assurent la publicité auprès des entrepreneurs français à l’étranger et accordent une attention particulière au suivi des dossiers de nos compatriotes éligibles à l’initiative. Afin de déployer plus rapidement et efficacement cette garantie, certains des critères d’octroi ont été assouplis en mai dernier et permettent d’en faire bénéficier davantage d’entreprises. Dans le cadre du programme Choose Africa Resilience, les clauses signées entre Proparco et les contreparties bancaires prévoient que les garanties ne couvrent que les prêts accordés à des TPE-PME. Malgré le regain d’intérêt récent de nos partenaires pour ces garanties dans de nombreux pays non encore couverts (Djibouti, Ouganda, RDC, Tanzanie, Tchad, Togo, Tunisie), suite notamment à l’assouplissement de certains critères d’éligibilité, il est difficile d’assurer que l’ensemble des garanties en cours d’instruction et identifiées pourront être mises en place, compte tenu des délais très courts pour instruire et signer ces opérations (au plus tard le 31/12/2021). En ce qui concerne les critères d’attribution du programme Choose Africa Resilience, les différents dispositifs ont clairement vocation à cibler les PME et les TPE. Le montant minimum des prêts a été abaissé à 500 euros (contre 10 000 euros pour les garanties ARIZ), afin de pouvoir cibler les plus petites entreprises. Pour Madagascar par exemple, la BNI, partenaire du programme, a octroyé des prêts de montants inférieurs à 5 000 euros, couverts par la garantie. Un volet garantie Resilience TPE a été également mis en place à l’attention des institutions de microfinance avec l’objectif de cibler les microentrepreneurs. Un bilan global du déploiement de ces garanties auprès des PME sera fait à l’occasion du premier conseil d’administration de Proparco en 2022. Enfin, une campagne de communication a été réalisée auprès des équipes France des géographies concernées, lors du lancement de l’initiative, afin d’assurer une plus grande visibilité de ces garanties auprès des entrepreneurs français. À travers ces différents dispositifs, un soutien ciblé est apporté aux besoins des entrepreneurs français de l’étranger et une attention particulière est portée aux remontées de terrain sur leur situation à travers les relais des ambassades, des conseillers du commerce extérieur de la France et des chambres de commerce françaises à l’étranger.